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Une envie de livres ?

11/05/2012

Futur chômeur ou la chronique du désespoir

Volontairement, je n'ai pas fait de billet pendant la campagne présidentielle, notamment parce que la politique n'a pas sa place ici. Or je risquais fort de déraper, étant donné que les programmes des candidats donnaient largememt matière à critique. 

Maintenant, c'est fini, je peux jouer. Oui mais non. Je suis d'une humeur trop triste pour cela.

C'est l'été, enfin presque, c'est surtout la saison des copies. Qui m'enthousiasment, pour certaines, et me navrent, pour d'autres.

Extrait (d'une mauvaise, sinon...) copie de première année après le bac:

L'histoire regroupe les monuments historique parcourue par ordre chronologique. Elle est répertorié par des dates qui ont marqué l'histoire. Elle a débuter avec ces rois et ces monarchies,  puis avec ces prèsidents et ces républiques. Elle a eue d'abord les guerre civils, celle des Vendées ou celle des Camisards. le peuple lutter contre les inégalités avec les autorités. Celle où la population lutter pour ces terre comme celle de la première ou seconde guerre mondial. Entre la France et les nazis. 

Je vous épargne la graphie qui montre à quel point l'écrit est une pratique très rare pour cet étudiant. Je vous épargne aussi les commentaires sur le fond.

Alors, en consultant les anciens, enseignants ou non, j'ai appris qu'il y a trente ans déjà, bien sûr, des bacheliers avaient déjà un don particulier pour attirer les fautes comme les aimants les aiguilles. Bon. Donc n'attendez pas de moi que je dise que le niveau baisse, la seule chose que je sais, c'est qu'il est loin d'être satisfaisant  - quel doux euphémisme.

Je suis navrée par ces copies. J'essaie de me consoler avec les bonnes feuilles, celles qui montrent que l'on a travaillé pour quelque chose. En vérité, il faudrait que j'enseigne le français et non l'histoire à la majorité de mes étudiants. Et l'histoire, seulement à ceux qui auraient validé une sorte de certificat attestant de leur maîtrise de la langue française. Enseigner l'histoire à ceux qui savent qu'une phrase se compose d'un sujet, d'un verbe et d'un complément, cela a du sens. Aux autres, cet enseignement apporte peu voire rien. Il ne leur apportera en tout cas pas un diplôme. C'est le chômage qui les attend, car du moindre  des employés, l'on attend au moins la maîtrise du français. Des fautes sur le CV et ce dernier part à la poubelle. Car n'en déplaise aux adeptes de la réforme de l'orthographe, palet et palais, cela n'a pas du tout le même sens. Donc niveler par le bas ne sert à rien, sauf à scier la branche et déboussoler les élèves. 

Je suis fatiguée. Je me sens inutile, complètement inutile. Je suis fatiguée de ramer à contre-courant, d'appeler nos  gouvernants - comme tant d'autres collègues - à l'aide, en vain, en vain, en vain. 

Établir une note éliminatoire au brevet, un certificat, enfin quelque chose qui certifie de la maîtrise de la langue, est-ce si difficile? Quand aura-t-on ce peu de compassion dont les élèves ont tant besoin? Je ne suis pas professeur de français, ce n'est pas mon métier. À quoi sert le socle des connaissances - intéressant sur le papier - sauf à constater que tant et tant d'élèves ne maîtrisent pas l'essentiel? À quoi sert-il si l'on laisse passer en classe supérieure un enfant dès le primaire "parce qu'il est déjà grand pour son âge, alors vous comprenez, il sera malheureux s'il redouble". Le faire redoubler sans rien mettre en oeuvre de plus pour le repêcher, possible que ça ne  serve à rien, possible que ça crée de la souffrance, c'est certain même. Alors il faut des classes de remise à niveau, il faut un vrai soutien et pas cette vaste blague que l'on appelle accompagnement personnalisé.

Quel ministre de l'éducation gouvernera enfin en consultant d'autres conseillers que des gens qui n'ont pas mis les pieds dans une salle de classe une fois dans leur vie ou depuis des années? Quel ministre gouvernera sans compulser les statistiques des rapports mais en écoutant d'abord les enseignants du primaire et du collège? Ce soir, j'en pleurerais de découragement. 

Combien faudra-t-il encore de générations d'enfants broyées pour que l'on réagisse? Combien? La lutte contre le chômage est une urgence? Alors l'enseignement en est une autre.

Monsieur Peillon, puisque l'on dit que ce sera vous notre ministre... Monsieur Peillon, ayez pitié. Oh pas des enseignants, je n'en demande pas tant. Depuis quand un ministre de l'éducation a-t-il défendu ses enseignants?

Mais ayez au moins pitié des enfants. Ceux-là qui ne sont pas des cobayes, retirez-les des mains des apprentis sorciers. 

Est-ce si  difficile de ne pas considérer qu'un enfant a besoin de méthodes éprouvées et non pas de servir d'objet d'expérience pour chercheurs en mal de notoriété ou avides de sujets d'étude? 

Combien de temps faudra-t-il attendre encore? Si seulement nos dirigeants avaient un peu de compassion. Juste un tout petit peu.




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7 commentaires:

NAIF a dit…

Il y a quelques années un professeur du supérieur m'a dit que dans certaines universités les étudiants s'inscrivent en histoire car ils pensent qu'on va leur en raconter avant qu'ils aillent toucher le RMI (aujourd'hui le RSA).
Vaste gâchis.

J'espère que vous trouvez quand même suffisamment de belles copies pour ne pas regretter ces rois et ces monarchies de l'époque révolue où les mauvais serviteurs de l'état finissaient pendus.

la Souris des archives a dit…

Oh ces étudiants-là n'ont jamais tenu très longtemps. Mon drame ce sont les étudiants de bonne volonté qui n'ont malheureusement pas le bagage qu'ils devraient avoir avec un baccalauréat (ou alors le bac ne veut plus rien dire auquel cas on le supprime, autant être cohérent et éviter le gâchis d'argent public). Il va s'en dire que je ne souhaite pas la suppression des obstacles, donc pas la suppression du bac. Pas plus que je ne regrette l'ancien régime, surtout pour sa justice à l'égard de ses grands serviteurs...

Aelithis a dit…

Comment dire... Cela ne me surprend même plus. Je n'ai jamais autant trafiqué les notes de mes élèves que cette année. Car nous avons obligation de résultats. Mais, parfois, c'est impossible. Que faire quand un élève n'est même pas capable de refaire le tout premier exercice, très simple, vu en TD? Comment peut-on pallier à l'absence d'apprentissage du cours? Les élèves ne voient même plus l'intérêt de ce dernier et sont choqués quand on leur parle de la nécessité du par cœur...
Pas grave pour eux, il existe toujours des modules conçus pour remonter les moyennes des étudiants (et qui ont l'effet inverse sur le moral de leurs professeurs)!
Et dire que l'année prochaine, on recrute directement après le bac... je crains le pire!

Kroko a dit…

je suis on ne peut plus d'accord ma souris adorée. D'ailleurs quand je vois moi même les fôtes que je fais à force de lire des inepties un peu partout (vive la mémoire visuelle), je songe sérieusement à lire un Bescherelle tous les soirs pour y remédier.
Bises,
Kroko

Condorcet a dit…

Quand j'ai commencé le cursus d'histoire à l'université de Tours en 1996, 20 % d'entre nous ont obtenu toutes les UE la première année : il y avait encore une vraie sélection. Elle reste aujourd'hui un ressort incontournable de la méritocratie, à moins de considérer qu'un diplôme ne vaut guère plus qu'un assignat à la fin du Directoire...

Anonyme a dit…

Et que dire quand on a une tribu de précoces ? A la bêtise de l’Éducation Nationale s'ajoute l'incompréhension de la différence. Un travail quotidien, pour faire passer des concepts, expliquer, recadrer. Alors que P...ain, deux petits jours de formation, un peu d'ouverture d'esprit, et on emmène ses mômes là au bout du monde...
Mes enfants sont donc dans des classes Montessori : une merveille pour l'apprentissage, l'acquisition des savoirs. Dans ces écoles, tant que les concepts ne sont pas acquis, on reprend, jusqu'à ce que l'enfant, dont la maturité ne correspond pas forcément à son l'âge, ait assimilé, et compris. Pourquoi ne fait-on pas cela partout ? Pourquoi noter en primaire des enfants qui sont là pour apprendre, et non pour se lancer dans la compétition ? Quand je lis mes copies de licence, il y a parfois de quoi hurler.
Mais non, le mammouth ne bougera pas, on va garder de bons vieux modèles qui ne marchent pas, c'est mieux comme ça !

bonbon pas cher a dit…

Il faut se féliciter des taux de réussite, c'est tout ce qui compte maintenant. La valeur du diplôme est oubliée. Même des diplômés de Lettres font des fautes d'orthographe.